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Titre du blog : La pratique du communisme selon marx
Auteur : lapratiqueducommunisme
Date de création : 17-11-2010
 
posté le 17-11-2010 à 12:03:03

C.2 Une nouvelle conception de la dictature du prolétariat

C.2.1 L’inspiration communard


Ainsi ce n’est qu’à partir de l’événement de la commune de Paris que Marx et Engels comprirent que :

« Du moment que la situation appelle la transformation totale de l’ordre social, les masses doivent y participer directement, et elles doivent avoir la compréhension de ce qui est en jeu et de ce qu’il faut conquérir. »

Engel, Préface de « La guerre civile en France »


En effet, si nous revenons à l’aube de la dictature du prolétariat, beaucoup de forces politiques sont en jeu et le risque de contre révolution est très grand. Mais de la même manière que dans la Commune, il ne faut pas isoler le peuple du pouvoir car sinon celui-ci se détourne du pouvoir et vient grossir les rangs des forces politiques opposées. Le gouvernement est alors contraint d’appliquer une dictature féroce, de la même manière que l’avait fait Robespierre, afin de garantir la nouvelle prise de pouvoir. Ainsi, bien que la Commune de Paris soit très largement minoritaire face aux versaillais et que la chance de réussite de cette dernière soit très faible, la population parisienne a massivement suivi les Communards, jusqu'à la mort. Ceci n’a été possible uniquement en leur faisant participer au changement de l’ordre social. En effet, grâce aux diverses clubs qui se sont créés et à la multiplication des journaux, les parisiens ont acquis une conscience politique et ont clairement compris les enjeux de la Commune. Ils ont alors participé positivement aux multiples votes qui leur étaient constamment proposés. Ils se sont même battus pour garder ce système. La Commune de Paris n’était pas seulement un coup d'État, c'est-à-dire le renversement du pouvoir par une poignée d’hommes, mais une véritable révolution suivie d’une démocratie quasi-directe où chaque parisien participait à l’organisation de ce nouvel État. Cependant nous devons tout de même noter l’existence d’un comité de salut public, d’un comité de sûreté générale, ainsi que l’interdiction de la presse anti-communarde. La nouvelle conception de la dictature du prolétariat doit aller dans ce sens, c'est-à-dire un mélange entre la participation active du peuple et son éducation politique à la démocratie et une dictature féroce qui ne tolère pas les autres forces politiques.

La dictature féroce reste une nécessité car les problèmes de la crise révolutionnaire que nous avons évoqués précédemment sont toujours présents. En effet, les forces politiques, qui s’opposent au prolétariat, sont prêtes à acquérir le pouvoir, ainsi que l’ancien régime. Vouloir la démocratie tout de suite reviendrait à refaire les mêmes erreurs que celles que nous avons vues dans notre analyse du 18 Brumaire de Louis Bonaparte. Marx propose cette fois une combinaison entre ces deux systèmes. Il s’agit alors de lutte contre les autres forces politiques opposées et de faire rentrer le peuple dans le gouvernement du prolétariat.










« La Commune était formée de conseillers municipaux élus dans les circonscriptions parisiennes au suffrage universel. En supprimant ceux des organes de l’ancien pouvoir gouvernemental qui servaient seulement à opprimer le peuple, la Commune a dépouillé de ses fonctions légales le pouvoir qui prétendait se tenir au-dessus de la société et les a transmis aux serviteurs responsables de celle-ci. Le peuple organisé en communes était, désormais, appelé à se servir du suffrage universel exactement comme n’importe quel employeur qui se sert de son droit individuel de choisir les ouvriers, les surveillants, les comptables pour ses entreprises. »1


Comme nous l’avons vu précédemment, la commune était formée d’un conseil élu au suffrage universel. Le suffrage universel consiste en la reconnaissance du droit de vote à l’ensemble des membres d’une communauté, sans distinction de condition sociale, d’origine ethnique, de race ou de sexe. Le suffrage universel est donc une condition nécessaire de toute démocratie, c'est-à-dire à tout système qui a le peuple pour souverain. Le suffrage est donc non seulement universel mais aussi égal, secret et souverain, c'est-à-dire qu’aucun principe ne peut contester sur le choix réalisé dans ce scrutin. De plus nous pouvons dire qu’un suffrage est universel si et seulement si, il existe une véritable concurrence, aussi bien d’un point de vue financier que médiatique, entre les différentes candidats présentés aux électeurs. Aussi, nous pouvons assurer que les élections de la Commune de Paris de 1871 étaient bien un suffrage universel car le conseil de la Commune était composés de candidats de diverses horizons, comme nous l’avons vu précédemment. Avant cela, pendant la gouvernance de Napoléon III, le pouvoir exécutif est confié à un président qui est élu pour 10 ans. Le chef de l'État est alors le seul à l’origine des lois qu’il promulgue et les ministres ne sont responsables que devant lui. Le président est aussi le seul à nommer tous les emplois civils et militaires de la fonction publique, qui doivent prêter serment de fidélité en la personne du président. De plus il est le seul à rendre la justice, à pouvoir déclarer la guerre, à conclure des traitées de paix ou de commerce. De l’autre coté, il est créé une assemblée nationale élue en théorie au suffrage universel masculin, mais les historiens ont établi qu’il a été accompagné de bourrage d’urne, et chaque député doit prêter serment de fidélité au président. Ainsi toute opposition est exclue de l’assemblée nationale. Nous pouvons noter une transformation sociale radicale entre l’ancien système et le nouveau système communard. L’ancien système ne laissait aucune place à la parole du peuple et encore moins dans le pouvoir politique. Le suffrage universel qui était organisé n’en n’était pas un car les candidats proposés au peuple n’avaient pas de différence fondamentale. Les candidats opposés au gouvernement sont même exclus du pouvoir, bien qu’élus par le peuple. Les organes du pouvoir de l’ancien système ne servent donc qu’à servir ceux qui sont au pouvoir et à opprimer le peuple. Le gouvernement de la Commune rétablit la souveraineté du peuple.

En effet, dans le gouvernement de Napoléon 3, il y a clairement eu une élite sociale qui prétend a gouverner pour le bien du peuple. Mais le peuple n'a même pas pu jouer un rôle minimum dans les décisions du gouvernement. Il n'a put ni choisir l’assemblée nationale, ni le président car bien qu’ils soient soumis au suffrage universel, non seulement celui-ci n’a pas été respecté mais en plus il a été est trafiqué. Ceci est donc un suffrage universel sans choix qui n’a eu pour objectif que de légitimer le pouvoir et de mobiliser des masses, que l’on veut dociles au pouvoir, pour justifier les choix du pouvoir. En réalité, il y a alors deux catégories de population, celle qui dirige et celle qui exécute. Mais ceci a clairement éclaté avec l’avènement de la Commune. Cette dernière a redonné le pouvoir au peuple parisien qui a pu s’exprimer sur ses propres choix. Ainsi elle a transmis le pouvoir aux « serviteurs responsables de celle-ci ». Les serviteurs responsables du pouvoir sont alors le peuple dans sa diversité. En effet, la responsabilité est l’action qui désigne le fait de répondre de ses actes. Or le pouvoir politique désigne toutes les actions qui changent et dirigent la société. Mais cette société est composée de l’ensemble de la population. Le pouvoir doit alors appartenir à ceux qui subissent ce même pouvoir car c’est seulement dans ce sens qu’ils peuvent être responsables. Ils répondent ainsi toujours de leurs actes car ce sont eux qui les subissent directement. S’il y a une différence entre le dirigeant et l’exécutant alors le dirigeant ne répond jamais de ses actes car il ne les subit jamais. Il n’est donc pas responsable car personne ne peut lui faire répondre de ses propres actes. Seul le peuple peut être responsable du pouvoir. Cependant le peuple est toujours serviteur du pouvoir car tous les membres de la société ne peuvent pas diriger en même temps, ils élisent donc des représentants. Ces représentants sont alors les serviteurs du peuple car ils sont toujours responsables devant lui. C'est-à-dire que le peuple qui subit le pouvoir peut faire répondre de leurs actes les représentants de ce dernier. Mais encore, dans la Commune, le pouvoir du peuple ne se limite pas juste à l’élection de représentants, mais aussi à de multiple référendums portant sur des décisions fondamentales. Mais pour Marx, dans la dictature du prolétariat, le pouvoir du peuple ne se limite pas juste à ceci comme nous allons le voir, prochainement.

Dés le début de la Commune, le peuple est appelé à la conquête de la démocratie. Marx utilise une analogie avec l’entreprise pour montrer trois choses. D’abord, de la même manière que les chefs d’entreprise, le prolétaire devient maître de son destin et du système politique qu’il choisit pour son entreprise, c'est-à-dire que son pays est sa propriété. Ensuite, Marx affirme que dans cette entreprise le prolétaire est libre, comme l’était le chef d’entreprise devant ses subordonnés. Les sénateurs, les députés et même le président éventuels sont au service des prolétaires et ces prolétaires ont le pouvoir de choisir librement qui va les servir. Le suffrage universel, si et seulement si celui-ci correspond à la définition précédemment donnée, rend le peuple souverain, c'est-à-dire maître et responsable de son destin politique. Enfin Marx marque par cette analogie le revers de la situation qui fait qu’avant la révolution, seul le patron avait la possibilité de choisir (dans son entreprise et dans la politique). Le peuple était esclave de la classe sociale dominante, dans la mesure où il n’avait jamais le choix. Maintenant les bourgeois perdent tous les pouvoirs et ce sont les prolétaires qui ont non seulement le pouvoir politique, mais aussi la gouvernance des entreprises. Marx ajoute aussi que le peuple est organisé en commune. Ceci peut avoir deux sens, d’une part Marx fait ici référence à la Commune de Paris de 1871 et donc le peuple n’est plus le peuple de France, mais il le réduit à celui de Paris. Ou bien, Marx fait allusion à une nouvelle forme de politique possible où le peuple, à travers tout un état, s’organise en petites instances politiques sous forme de communes. Le terme « commune » vient du latin « communis » qui signifie appartenir à tous. La commune est aussi le terme général pour désigner les villes et les villages. L’organisation sous forme communale donnerait alors les pleins pouvoirs aux habitants et représentants des communes. L'État s’organiserait sous la forme fédérale. Cependant, ceci n’est qu’une hypothèse, Marx ne développe jamais précisément ce sujet, bien qu’il envisage la dictature du prolétariat que sous la forme d’analogie à la Commune de Paris de 1871.

C.2.2 Les actions pratiques de cette nouvelle dictature du prolétariat


Marx et Engels, pour cette nouvelle conception, se réfèrent directement aux caractéristiques institutionnelles de la Commune de Paris. La dictature du prolétariat s’organise en quatre temps qui s’impliquent les uns dans les autres.2

La première condition est de former une armée populaire, c'est-à-dire de fournir des armes à tous les prolétaires, et ceci pour quatre raisons essentielles. D’abord, afin de maintenir l’état de révolution puisque plusieurs forces politiques restent en concurrence. Aussi, petits bourgeois et prolétaires peuvent encore aspirer au pouvoir. Mais, comme nous l’avons vu, seuls, les prolétaires ont une raison de maintenir une révolution permanente. Effectivement, les prolétaires armés prennent les moyens de production qu’ils confisquent au profit de la communauté. Une fois que les prolétaires ont conquis et nationalisé toutes les grandes entreprises, ils s’attaquent aux petites. Alors petits et grands bourgeois tombent dans le prolétariat. Mais ceci n’est possible que si le prolétariat, c'est-à-dire la classe la plus nombreuse, est armée et si elle arrive à faire face à la bourgeoisie qui protège ses acquis. La confrontation violente avec la bourgeoisie n’est pas une nécessité si celle-ci n’entreprend pas de préserver ses moyens de production (ce qui semble cependant inévitable). Alors ceci nous conduit à la deuxième raison de la nécessité d’une armée populaire : répondre aux risques de la contre révolution. Cette contre révolution peut venir soit de l’extérieur, soit de l’intérieur. Si celle-ci vient de l’extérieur, alors chaque prolétaire armé vient grossir les rangs de l’armée nationale et donc, comme pour la Commune, l’opposant s’attaque à un peuple tout entier qui se bat pour sa propre liberté. Ceci donne alors beaucoup plus de force à ce peuple, du point de vue de la volonté et du courage. En effet, malgré la force physique de l’autre armée et malgré l’avancée de l’invasion, l’armée d’en face se bat généralement pour des intérêts politiques qui dépassent les soldats alors que le peuple se bat pour sa liberté. Ainsi, nous avons déjà eu plusieurs exemples de ceci à travers l’Histoire, notamment entre les Etat Unis et le Vietnam ou même la Corée, entre l’URSS et l’Afghanistan et enfin ceci est vrai pour toutes les guerres de décolonisation. Le peuple qui a conscience de se battre pour sa liberté est infiniment plus déterminé qu’une armée de soldats qui se bat plus pour un salaire que par pure conviction politique. C’est pourquoi il est nécessaire de fournir, dès la fin de la révolution, des armes aux prolétaires afin qu’ils aient conscience d’avoir leur destin entre leurs mains et qu'ils sachent qu’ils doivent se battre pour leur liberté politique. L’autre alternative est que la contre-révolution vienne de l’intérieur et dans ce cas chaque prolétaire armé a le pouvoir de lutter contre les groupuscules d’opposition politique. L’armée populaire étant composée de prolétaires, la classe sociale la plus nombreuse, ils peuvent alors lutter contre n’importe quelle force politique d’opposition intérieure. Ensuite, la mise en arme du peuple garantit les conditions du pouvoir au peuple ainsi que les moyens matériels de ce pouvoir. En effet, cette mesure permet d’éviter un monopole du pouvoir par une élite d’intellectuels ou par un tyran en puissance. Si le peuple est mécontent, s’il subit des lois qui ne sont pas en conformité avec leurs intérêts, en d’autres termes, si le peuple est soumis dans une quelconque circonstance il a toujours les moyens de renverser ce tyran ou ce gouvernement. Ainsi seul le peuple possède le monopole de la violence légitime et c’est en ce sens qu’il garantit son pouvoir souverain face à ceux qui font l’exercice de ce pouvoir. Enfin et surtout, cette mesure vise à garantir la réalisation des autres mesures que nous allons voir prochainement. Mais avant cela nous devons noter que cette mesure fait prendre le risque de faire sombrer le pays dans une guerre civile. En effet, comme nous l’avons vu précédemment, paysans et petits bourgeois sont aussi nombreux que les prolétaires. Aussi à la chute de la grande bourgeoisie, ils n’ont pas les mêmes intérêts que les prolétaires et s’ils décident de reprendre le pouvoir alors la guerre civile est inévitable. Nous devons donc conclure qu’après la révolution, seule les prolétaires devront être armées, mais ceci n’empêche pas les pays étrangers d’armer les autres classes sociales. Ceci est problématique, mais nous allons voir la réponse à ce problème dans une future partie.


La seconde mesure ne possède aucune référence chez Marx ou Engel, cependant elle est posée par ces deux philosophes comme critère d’une ligne juste pour des partis ouvriers. Aussi cette mesure semble donc nécessaire car elle vise la suppression d’un organisme parlementaire pour la mise en place d’un corps agissant qui possèdent le pouvoir exécutif et législatif à la fois. Le pouvoir exécutif est la pratique politique de l’action qui consiste à œuvrer pour la mise en place des lois d’un pays. Le pouvoir législatif est la création des lois d’un pays. L’objectif est donc que celui qui crée, qui exécute et qui fait exécuter les lois soit une seule et même personne. Or le corps agissant n’est, dans ces conditions, rien d’autre que le peuple. En effet, le peuple est le pouvoir exécutif, car étant armé, il est le seul qui puisse faire respecter la loi. En effet, s’il l’on cherche à lui imposer une loi qu’il ne peut tolérer, alors il possède toujours les moyens physiques de se révolter. Le peuple est, dans ces conditions, réellement libre dans la mesure où il suit les règles qu’il s’est lui-même imposé. Ainsi il n’y a pas de sens à diviser l’exécutif du législatif car le peuple est armé et aucune instance n'est en mesure de s’imposer face au peuple. Cette mesure vise le passage de la démocratie représentative à une démocratie directe, ce qui présuppose alors une taille relativement réduite des « États ». Le terme « État » est d’ailleurs totalement dénudé de sens car nous sommes plus amenés à parler de communes. Dans une démocratie représentative, le peuple élit des représentants, pour le pouvoir législatif et pour l’exécutif. Les représentants du législatif créent alors les lois et l’exécutif l’organise et le fait exécuter au peuple. Mais le peuple ne choisit pas réellement les lois, il choisit seulement les représentants. Il n’a donc pas les moyens de se révolter contre l’exécutif. Même s’il fait grève, son effet reste toujours très limité. Il subit alors les lois des représentants et ceci pendant un certain nombre d’années défini par la loi. Dans une démocratie directe, c’est le peuple qui fait la loi, ceci présuppose des organisations de masse et des restrictions des domaines où la loi légifère. Les organisations de masse sont nécessaires pour réunir régulièrement le peuple d’une commune afin qu’ils puissent débattre et délibérer des problèmes de leur société. A l’image de la Commune de Paris et de ses nombreux clubs d’ouvriers, la population peut débattre et s’exprimer librement et ainsi acquérir une certaine conscience politique. Ce genre d’organisme est nécessaire car il remplace directement le rôle politique de l’assemblée nationale et même des conseils municipaux. Comme nous l’avons remarqué ceci n’est possible seulement sur des domaines restreints car l’organisation choisie par une commune peut être différent de celle choisie par une autre. Ces organismes de masse ont toujours besoin d’une bureaucratisation de plus en plus importante et lourde proportionnellement au nombre de citoyens concernés. Ainsi si ceci est envisageable pour 5 ou 10 milles personnes, ceci devient très compliqué pour réunir prés d’un million de personne, comme dans les grandes métropoles. Le système de démocratie directe n’est possible que sur des populations restreintes, mais ceci a tout de même été possible dans la Commune de Paris. L’objectif est alors de donner aux prolétaires le pouvoir et c’est seulement en ce sens que la dictature du prolétariat est envisagée comme une démocratie. Cependant nous pouvons remarquer plusieurs problèmes vis-à-vis d’une politique extérieure. En effet, il semble toujours nécessaire, déjà à l’époque de Marx mais surtout à l’époque de mondialisation, qu’un pays regroupe une force politique suffisante pour résister à la pression des autres pays, sans pour autant s’imposer. Un état fédéral semble aussi être nécessaire.

 

La troisième mesure de cette dictature du prolétariat consiste d’une part à la suppression des organes répressif de l'État et d’autre part au remaniement des fonctionnaires. Dans un premier temps, la suppression de la police est nécessaire pour deux raisons. D’abord, car sa fonction est devenue absurde depuis que le peuple est armé. En effet, un policier ne peut s’imposer par rapport à un individu delta seulement s'il est, d’une part, le seul à avoir l’usage légitimement de la violence et, d’autre part, car il a l’avantage, par le biais de ses armes, sur cet individu en cas de résistance. Mais maintenant, chaque homme possède une arme fournie par l’état et, comme nous l’avons vu, seul le peuple possède le monopole de la violence légitime. La police n’a alors plus de raison d’être car elle ne se positionne plus au niveau supérieur par rapport au peuple. Elle n’a pas les moyens de faire respecter la loi. Ensuite, la police est supprimée car, à la fin de la révolution, elle représente la seule force militaire d’opposition. En effet, la police regroupe, en théorie, les hommes qui ont choisi de servir leur pays en faisant respecter la loi d’un certain régime. Or si ce régime change alors les lois changent également car elles sont au service du nouveau régime, c'est-à-dire ici des prolétaires. Les engagements envers l’ancien régime sont la preuve de leur engagement politique. Aussi une si grande force armée en face du nouveau régime ne peut être qu’un problème. C’est pourquoi il est nécessaire de les supprimer. Dans un second temps, il est nécessaire de remplacer les fonctionnaires. A l'époque de Marx plus particulièrement, les fonctionnaires, c'est-à-dire les hommes employés au service de l'État, occupaient les fonctions les plus importantes, ils avaient donc un certain nombre d’avantages par rapport aux autres citoyens, par exemple la sécurité de l’emploi et le salaire. Ils étaient alors « classés » comme supérieur au reste de la société car ils servaient les dirigeants. Marx vise alors à supprimer ce système hiérarchique en remplaçant les fonctionnaires par des ouvriers, y compris au niveau du salaire, Ainsi d’une part les fonctionnaires ne seront plus supérieurs au niveau financier mais d’autre part les nouveaux fonctionnaires, venant directement du peuple, seront fidèles au nouveau régime qui les a mis en fonction, mais aussi au peuple car ils en sont directement issus. De plus ceci permet de réaliser des rotations de fonctionnaires parmi le peuple. Enfin, Marx veut remplacer les fonctionnaires afin que ce soit le peuple (et plus particulièrement les prolétaires) qui investissent les organes du pouvoir. Ainsi Marx déclare qu’il faut abolir toute « investiture hiérarchique et à faire du personnel spécialisé de l’appareil d'État un ensemble de « serviteurs responsables de la société » pris dans son sein, et non situés « au dessus d’elle » ».3Le rôle des fonctionnaires ne change pas en et pour soit. Le changement réside dans les hommes eux-mêmes qui servent ces fonctions. Les anciens fonctionnaires sont remplacés par d’anciens prolétaires et ceci afin que ces derniers aient une dette envers le régime communiste et envers la société des prolétaires. Les prolétaires fonctionnaires sont plus à même de servir les autres prolétaires. Il y a un renversement du statut du fonctionnaire qui passe de serviteur de l'État à serviteur du peuple. Le peuple investit alors tous les organes de l'État que ce soit du point de vue administratif, répressif et militaire ou dans les organes directes du pouvoir. En ce sens, la dictature du prolétariat est une démocratie.


La dernière mesure relevée par Marx et Engels a toujours été en discussion avec les Anarchistes, mais elle semble être dans une continuation logique face aux exigences créée par le capitalisme. Ces exigences sont alors liées au productivisme capitalisme qui a permis de faire évoluer la population techniquement et matériellement. De plus, avec la mondialisation déjà présente à l’époque de Marx, la population possède de nouveaux besoins qu'il est bon d’entretenir. Aussi il s’agit alors d’organiser la production nationale. La production nationale correspond à la somme de toutes les entreprises et industries qui sont nécessaires pour le bon fonctionnement de la société. Ceci est alors l’étape qui suit la nationalisation des industries. Cette production nationale s’organisera alors en deux parties. D’abord, il s’agit, au cœur de l'État, de planifier et de centraliser les fonctions générales de la société. Ces fonctions générales regroupent alors tous les secteurs qu'il est vital de développer pour le bon fonctionnement de la société à un moment donné. Ainsi nous pouvons citer, entre autre, l’agriculture et les industries agroalimentaires en général, le secteur industriel, pharmaceutique, militaire, aéronautique et éducatif. D’autres secteurs sont alors laissés à des organisations plus particulières car ils sont beaucoup moins vitaux, comme par exemple le tourisme, la culture, le sport ou les loisirs. La centralisation et la planification de la production nationale ont alors pour objectif de définir des travaux d’intérêts généraux qui sont à réaliser pendant une période définie. Ces travaux regroupent tout ce qui est nécessaire pour la survie de la société. Pour se faire, nous n’avons pas d’élément plus concret, cependant nous devons noter que ceci est l’élément le plus important pour la nouvelle société communiste. Compte tenu des mesures précédemment énoncées, nous pouvons présupposer que ceci doit être géré par le peuple, à travers une instance de représentants du prolétariat. Aussi ceci devra se faire avec une nouvelle entreprise de fonctionnaires (car ceci semble le mieux définir une entreprise de la communauté gérée par le peuple et pour le peuple) et en partenariat avec, ce que Marx appelle, « une direction intellectuelle des ouvriers des villes »4. Il n’est pas question que cette instance de fonctionnaire obtienne la main mise sur l’organe le plus important de l’ensemble des communautés. Par ailleurs, cette direction fait partis d’une nécessité pour une organisation de la production nationale. Cette direction est alors une instance qui regroupe des élus des ouvriers des différentes communes. Encore une fois nous devons imaginer que ces élus doivent se partager les travaux d’intérêt généraux et ils les rapportent à leurs communes correspondantes. Ils font alors la médiation entre les fonctionnaires qui sont chargés de définir et planifier les taches nécessaires et le peuple qui est chargé de les réaliser. Nous n’avons cependant pas d’information supplémentaire hormis le nom même de « direction intellectuelle des ouvriers des villes ». Marx n’a malheureusement jamais réellement bien développé et organisé ces mesures mais elles sont cependant un point fondamental pour une compréhension de la dictature du prolétariat selon lui.

Maintenant que nous avons vu comment Marx envisageait concrètement cette nouvelle conception, nous devons cependant noter qu’il n’a jamais renié la première conception de la dictature du prolétariat. Nous allons alors maintenant voir quelle place donne-t-il a chacun de ces deux principes.

C.2.3 une dictature du prolétariat flexible aux conditions de vie des pays


« Elle (la révolution du prolétariat) établira en tout premier lieu l’administration démocratique de l’Etat et instaurera ainsi, directement ou indirectement, la domination politique du prolétariat. Directement : en Angleterre où les prolétaires forment la majorité du peuple ; indirectement en France et en Allemagne où la majorité du peuple n’est pas composée seulement de prolétaires, mais encore de petits paysans et de petits bourgeois, qui commencent seulement de passer au sein du prolétariat et donc les intérêts politiques tombent de plus en plus, sous la dépendance du prolétariat. »

Les principes du communisme, traduction russe sous la rédaction de Zinoviev, p.22, Lu dans« Marx et Le Problème de la dictature du prolétariat » par Julius Martov.


D’abord, Marx réaffirme quelque chose qu’il n’avait jamais été déclaré auparavant, lors de sa première conception de la dictature du prolétariat. En effet, l’objectif de la dictature du prolétariat a toujours été la prise de pouvoir, l’organisation, ainsi que la domination par le prolétariat. Mais, c’est la démocratique qui est la condition de la domination du prolétariat. La démocratie est, comme nous l’avons vu, le système politique qui donne le pouvoir au peuple. Or le peuple est composé majoritairement de prolétaires. Ainsi, dés la révolution, les intérêts des prolétaires domineront par une démocratie. Cependant, comme nous venons de le voir, la démocratie selon Marx est une démocratie directe où le principal pouvoir est communal. Cette démocratie comprend donc l'armement des prolétaires et la prise du pouvoir au niveau des institutions politiques (dans les communes et dans l’Etat par le biais de la direction intellectuelle des ouvriers des villes) et dans la fonction publique. La démocratie marxiste n’est pas la même que notre conception moderne. De plus, cette démocratie vise toujours à faire rentrer les autres classes sociales dans le prolétariat et ceci en centralisant et en organisant les moyens de production. Effectivement, la centralisation des moyens de production n’est rien d‘autre que le fait de les nationaliser (de les rendre publiques). Les petits bourgeois et les paysans se distinguent entre eux seulement par la nature de leurs moyens de production et ils se distinguent des prolétaires par la possession. Sans elle, ce sont donc des prolétaires. Mais ceci n’est possible seulement parce que les prolétaires peuvent être les plus nombreux et parce qu’ils peuvent être armé. Ainsi, selon ces deux conditions nécessaires et fondamentales, la gestion démocratique de l’Etat et la domination des prolétaires peut se faire de façon direction ou indirecte.

Ensuite, Marx déclare qu’elle peut se faire directement seulement là où « les prolétaires forment la majorité» et ceci pour trois raisons fondamentales. Premièrement, puisque la démocratie est le système politique qui vise à suivre les intérêts de la majorité du peuple, alors les intérêts des prolétaires seront toujours suivis et, dans ce sens, la domination des prolétaires est assurée. Deuxièmement, puisque les prolétaires forment la majorité du peuple et que l’état lui fournit des armes, ils ont alors la puissance matérielle pour lutter contre tout risque de contre-révolution, que ce soit venant de l’intérieur comme de l’extérieur. Le pouvoir des prolétaires est assuré par cette mesure. Troisièmement, dans la mesure où les prolétaires sont les plus nombreux, alors leur prise directe du pouvoir est une nécessité afin qu’ils puissent garder le pouvoir. En effet, sans cela et de la même manière que la terreur Jacobine, les prolétaires risquent d’aller grossir l’opposition afin de lutter contre les mesures qu’ils ne comprennent pas et qui n’apparaissent pas comme nécessaires et directement favorables. De plus l’administration et le pouvoir en place gouvernent en théorie au nom du peuple, mais ce pouvoir ne possède pas de garde fou, c'est-à-dire de contre pouvoir qui le limite. Si les prolétaires n’ont pas directement le pouvoir rien ne garantit la non corruption du pouvoir. Ainsi les prolétaires peuvent alors aller grossir les rangs de l’opposition. La révolution des prolétaires échouera alors au bénéfice d’une autre force politique. Seule la démocratie, dans la mesure où les prolétaires sont les plus nombreux, assure la domination des prolétaires et la survie de leur pouvoir. C’est donc, dans cette mesure, la seconde conception de la dictature du prolétariat qui s’impose.

Cependant, Marx envisage le fait que les prolétaires ne composent pas la majorité du peuple, alors l’après révolution doit passer par une médiation. Dans ce cas, le peuple est composé à majorité de petits bourgeois et de paysans. Une démocratie serait donc défavorable aux prolétaires car, qu’elle soit représentative ou directe, les intérêts du prolétariat ne seraient jamais pris en compte. Au mieux, ils devront faire des alliances (comme pour la révolution) pour pratiquer une politique du moindre mal. De plus, les prolétaires ne peuvent pas non plus s’imposer sur le plan militaire. Petits bourgeois et paysans protègent leur moyen de production. La révolution du prolétariat qui s’engage dans une démocratie semble profiter à une autre classe sociale. Cependant nous sommes dans des conditions de révolution qui ont débouché sur la première conception marxiste de la dictature du prolétariat. La révolution permanente, qui est la première vision marxiste de la dictature du prolétariat, s’impose et elle agit comme médiation avec la seconde dictature du prolétariat. C'est-à-dire qu'il s’agit de réduire les autres classes sociales pour les faire tomber dans le prolétariat et ensuite organiser une démocratie de la même manière que la deuxième conception de la dictature selon Marx. Aussi nous allons voir maintenant l’interaction entre ces deux conceptions de la dictature du prolétariat.

1 Citation de Karl Marx, lu dans « Marx et Le Problème de la dictature du prolétariat » par Julius Martov,

2 labica – Bensoussan, Dictionnaire Critique du Marxisme, PUF, Paris, 2001

3 labica – Bensoussan, Dictionnaire Critique du Marxisme, PUF, Paris, 2001 p.327

4 labica – Bensoussan, Dictionnaire Critique du Marxisme, PUF, Paris, 2001 p.327