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Titre du blog : La pratique du communisme selon marx
Auteur : lapratiqueducommunisme
Date de création : 17-11-2010
 
posté le 17-11-2010 à 11:59:25

B.5 Les Limites de cette conception et l’avènement de la « Commune » de Paris

Pour analyser cette partie, nous allons utiliser « Marx et Le Problème de la dictature du prolétariat »1 par Julius Martov, révolutionnaire marxiste russe, ami très proche de Lénine et opposant au Bolcheviks sur l’organisation de la dictature du prolétariat. Cet ouvrage relate parfaitement la transformation effectuée entre les deux conceptions de la dictature du prolétariat chez Marx. Tous les extraits qui vont suivre ont alors pour source cet ouvrage, dans le cas contraire nous indiquerons la source exacte.


« En 1895 (dans la préface à « La guerre civile en France ») Engels a établi le bilan de l’expérience de son ami et de lui-même : « Le temps est passé des révolutions accomplies par la prise soudaine du pouvoir par de petites minorités conscientes à la tête des masses inconscientes ». Lorsqu’il parle ainsi, Engels reconnaissait que, dans la première période de leur activité, il s’agissait pour lui et Marx, justement de la conquête du pouvoir politique « par une minorité consciente à la tête des masses inconscientes. »2


D’abord, Marx fait clairement référence à cette première conception de la dictature du prolétariat. En effet, il s’agit toujours de transformer les masses de la paysannerie et de la bourgeoisie pour les faire rentrer dans le prolétariat. Mais le prolétariat ne joue pas de rôle dirigeant. Au contraire, il subit les conséquences des règles établis pendant cette dictature. Ainsi, comme nous l’avons vu, les dirigeants sont des prolétaires établies en pouvoir politique, autrement dit, une poignée de prolétaires éclairés qui imposent leurs lois sur les masses. Ces dirigeants des prolétaires sont alors probablement et logiquement les dirigeants de la ligue des communistes. Cette conception de Marx est un héritage direct de la dictature Jacobine des années 1790. De la même manière que les Jacobins, la dictature du prolétariat s’impose pour défendre la souveraineté populaire. Le club des Jacobins est à l’origine un organisme regroupant des intellectuels de diverses visions et qui ont pour objectif de se présenter comme élaborateur d’idées et moteurs d’actions temporisatrices de l’Etat. Se développant au cours de l’histoire dans toute la France, nous pouvons dénombrer jusqu’à 5000 filiales de ce club à son paroxysme. La prise de pouvoir des Jacobin est directement poussée par Robespierre. Il en fait alors une force politique dominante appuyée par le peuple. A ce moment, le club se présente alors comme étant les représentants du peuple infaillibles, plus irréductibles et plus résolus que la masse du peuple. Ceci correspond alors parfaitement avec la définition et au rôle du parti communisme, comme nous l’avons vu précédemment et comme il est décrit dans le Manifeste du Parti Communiste. Après leur prise de pouvoir, suite à la chute des députés Girondins, le 2 juin 1793, les Jacobins prennent alors le pouvoir et s’imposent comme contrepoids à l’autorité de l’assemblée nationale. Ils prennent ensuite la tête du Comité de Salut Public. Ce comité est un organe du gouvernement révolutionnaire mis en place pour faire face aux dangers qui menacent la république. Ce comité joue alors le même rôle que celui de la dictature du prolétariat, c'est-à-dire éliminer tout risque de contre-révolution. Ceci a abouti à la période historique de « la Terreur », mais nous avons déjà parlé de cette ressemblance. Ici l’intérêt est surtout de comprendre comment, de la même manière que le club des Jacobins, la dictature du prolétariat est dirigée par des intellectuels au nom du peuple et non par le peuple lui même. Ceci est d’autant plus important que les faits historiques qui vont bouleverser l’histoire du XXème siècle se jouent entre cette vision de la dictature du prolétariat et celle que nous avons vu précédemment et qui est moins connue et jamais appliquée.

Il s’agit alors de remplacer les Jacobins par des révolutionnaires éclairés et de profiter de la confusion des masses pour organiser la révolution et l’après révolution. En effet, comme nous l’avons vu dans l’extrait de la Société universelle des communistes révolutionnaires de mi Avril 18503, la dictature est organisée par l’association des communistes qui continuent de jouer le rôle qu’ils avaient dans la révolution, c'est-à-dire orienter et diriger les prolétaires et ceci pour leur bien car : « ils ont sur le reste de la masse du prolétariat l’avantage de comprendre clairement les conditions, la marche et les résultats généraux du mouvement prolétarien »4 Le parti communiste, dans la révolution comme dans la dictature du prolétariat, possède un rôle supérieur sur le reste de la masse révolutionnaire. Ceci est naturel car les hommes qui sont à la tête de ce parti, hormis des capacités intellectuelles supposées supérieures à la masse, passent leur temps à s’informer, à réfléchir et à enrichir leur culture politique. Le reste de la masse doit travailler pour vivre, elle ne peut alors pas avoir une grande culture politique. Il faut « vivre d’abord et philosopher ensuite ». En effet, les nécessités de la vie sont manger, dormir et se reproduire. Sans ces conditions nécessaires, tout autre chose semble impossible. Ainsi les prolétaires, qui doivent travailler pour vivre et qui passent beaucoup de temps à travailler philosophent et réfléchissent moins que ce qui ont une source de revenue différente. Une source de revenue soit issue de rente, soit d’un ami riche (comme Marx avec Engels), soi de leurs travaux intellectuels. C’est pourquoi le parti communiste, qui regroupe la minorité intellectuelle du prolétariat, s’impose sur la masse prolétarienne. Cette masse est alors qualifiée ici d’inconscients car elle ne passe pas son temps à réfléchir à la suite du mouvement prolétarien et à la complexité politique des relations des forces politiques en jeu. Ainsi les prolétaires, encore plus que les bourgeois, ont la nécessité d’une gouvernance par une minorité pensante qui s’impose face sur une masse ignorante. C’est à partir de cette réflexion qu’est né le mouvement Jacobin et c’est aussi comme ceci qu’est conçue cette première conception de la dictature du prolétariat. Mais comme l’affirme Engel dans la préface de la guerre civile en France :


« Du moment que la situation appelle la transformation totale de l’ordre social, les masses doivent y participer directement, elles doivent avoir la compréhension de ce qui est en jeux et de ce qu’il faut conquérir. Voilà ce que nous a enseigné l’histoire du dernier demi-siècle. »5


Le dernier demi-siècle fait référence à la période historique de la Terreur. Cette dernière se divise en deux périodes. La première débute par la chute de la royauté le 10 aout 1792 et est marquée par l’institution du tribunal révolutionnaire qui est chargé de juger, sans possibilité de rejuger, les crimes commis le 10 aout. La seconde période s’étale du 2 juin 1793 au 30 juillet 1794 avec la destitution de Robespierre. Entre l’été de 1793 et celui de 1794, la Terreur atteignit son paroxysme. Le comité de Salut Public, divisé sur les styles de répression face aux « ennemis de la république » créa un « bureau de police » qui est censé contrôler les dérives du comité de sûreté générale. Ce comité n’est alors rien d’autre qu’une police politique qui fonctionne de façon étroite avec le tribunal révolutionnaire. Selon les historiens, ce comité de sûreté générale a alors fourni plus de mandats d’arrêts que toutes les autres autorités répressives du pays. Cependant, cette situation extrême fut nécessaire vis-à-vis de la situation de la France en cette période, même si elle n’en est pas moins extrême. En effet, Ce système ultra-répressif est mis en place pour rétablir la situation militaire française (qui fait face aux attaques de tous les pays royalistes qui l’entourent, à savoir : la Prusse, l’Autriche, l’Espagne et l’Angleterre) et afin d’éviter un coup d’Etat (car ces attaques militaires poussent les royalistes à agir). Cette répression aboutit à la surveillance des armées et à l’élimination des généraux qui sont jugés trop faibles et sont remplacés par de jeunes officiers fidèles à la république. Tous les hommes de 18 à 25 sont mobilisés de force et viennent grossir les rangs de chaque régiment par deux bataillons. Les républicains regagnent alors leurs pays petit à petit. C’est pendant cette période de guerre que la « Terreur » s’installe. Avec l’assassinat de Marat par Charlotte Corday, le sentiment anti royaliste est renforcé et ces derniers sont éliminés par de comité de sûreté générale. Ainsi Robespierre déclare à la convention le 12 aout 1793 : « Que le glaive de la loi, planant avec une rapidité terrible sur la tête des conspirateurs, frappe de terreur leurs complices ! Que ces grands exemples anéantissent les séditions par la terreur qu’ils inspireront à tous les ennemis de la patrie ! » Tout doute face à la fidélité à la patrie est suivi alors par une exécution. La terreur semble pourtant porter ses fruits car les manifestations fédéralistes sont matées, les Vendéens (royalistes) sont écrasés dans le sang et les attaques des pays étrangers sont repoussées. Cependant ceci ne marque par la fin de la Terreur car le comité de salut public veut assoir la république et pour ce faire, il constitue une liste d’indigents aux autorités locales et ils devront alors passer devant le tribunal révolutionnaire. Le comité de salut public, par la période de la Terreur a alors rempli parfaitement ces objectifs, à savoir, il a sauvé et assis le pouvoir de la république, il a contré les attaques des pays royalistes et il a éliminé toutes menaces de contre révolution. Ces objectifs sont alors les mêmes que celui d’une dictature du prolétariat, c'est-à-dire protéger de prolétariat de la contre-révolution et des pays ennemis. Mais ceci n’est pas à n’importe quel prix. Le peuple, pendant cette période, a clairement payé le prix pour cette victoire. Durant cette période, entre 16 000 et 17 000 personnes furent guillotinées, 25 000 furent victimes d’exécution sommaire et 500 000 furent emprisonnées. Il faut aussi noter que le tribunal révolutionnaire n’a prononcé que 16% de ces sentences, que 80% de ces victimes furent tuées pour rébellion ou pour trahison et 9% pour délit d’opinion. Voici donc ce que l’histoire du 18éme siècle a enseigné à Marx et Engels. Ainsi les masses doivent participer au changement social et en comprendre les enjeux afin d’éviter de tels massacres qui sont nécessaires si la masse de participe pas. En effet, c’est bien parce qu’une minorité d’intellectuels agissaient sans la masse et sans la compréhension de la masse qu’il y a eu les révoltes en Vendée, les diverses insurgées et ce doute qui planait constamment sur chaque membre de la masse. En effet, si les hommes ne comprennent pas, à ce moment de changement de société, pourquoi des efforts sont nécessaires, et pourquoi telle chose doit être subie alors nécessairement ces hommes préférons l’ancien système. Le doute face à la bonté de cette minorité d’intellectuels monte proportionnellement que grandit un doute de la volonté de changement de la masse. Plus les populations sont isolées du gouvernement et plus elles doutent de la sincérité de ce gouvernement. Inversement plus le gouvernement doute de la volonté de changer du peuple et plus il durcit ces lois contre d’éventuels ennemis (au nom du peuple) mais c’est toujours le peuple qui subit les conséquences. Ainsi la population doit intégrer la dictature du prolétariat et cette conception nait qu’avec l’événement de la commune de Paris, c'est-à-dire entre le 18 mars 1871 et le 28 mai 1871. Cependant nous devons rappeler que Marx mourus le 14 mars 1883, soit 12 ans après ces événement et ceci explique pourquoi il n’y a que peut d’écrit sur la dictature du prolétariat avec cette période. Ce dernier s'exerçait déjà à l’écriture du Capital qu’il ne pu finir. Nous allons alors donc voir maintenant la deuxième conception de la Dictature du prolétariat

1 http://www.marxists.org/francais/martov/works/1918/00/martov_19180000.htm

2 Lu dans, Marx et Le Problème de la dictature du prolétariat  par Julius Martov

3 Voir précédemment

4Manifeste du Parti communiste, Paris GF Flammarion, 1998, p91

5 Engels : préface à « La guerre civile en France », lu dans, Marx et Le Problème de la dictature du prolétariat  par Julius Martov