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Titre du blog : La pratique du communisme selon marx
Auteur : lapratiqueducommunisme
Date de création : 17-11-2010
 
posté le 17-11-2010 à 11:58:05

B.4 La fin théorique de la première conception de Dictature du prolétariat

Une fois que la bourgeoisie et la paysannerie sont tombées dans le prolétariat et que le prolétariat devient la seule classe sociale, la dictature du prolétariat n’est donc plus nécessaire. La transformation sociale et psychologique de la société doit marquer la fin du système médian de la dictature


« Une fois que les différences de classes auront disparu au cours du développement et que toute la production sera concentrée entre les mains des individus associées, les pouvoir publics perdront leur caractère politique. Le pouvoir politique au sens propre est le pouvoir organisé d’une classe pour l’oppression d’une autre […] il abolie du même coup les conditions d’existence de l’opposition de classes. Des classes en général et par la suite sa propre domination de classe. A la vieille société bourgeoise avec ses classes et ses oppositions de classes se substitue une association dans laquelle le libre développement de chacun est la condition du libre développent de tous. »

Manifeste du Parti Communiste, Paris GF Flammarion, 1998 p.101


Ici Marx nous montre la fin théorique de la dictature du prolétariat et le début de la société communiste. D’abord, cette fin est marquée par la disparition des différences de classes et par la concentration des moyens de production. Nous devons remarquer que Marx ne parle pas d’Etat mais d’individus associés. Chez Marx, l’Etat et plus profondément encore le caractère politique du pouvoir d’Etat, disparaît. Autrement dit, non seulement le concept même d’Etat disparaît mais aussi sa fonction dans le système communautaire. Il est remplacé par les individus associés. Avant de développer ce point, nous devons rappeler une dernière fois que les différences de classes disparaissent à travers la dictature du prolétariat. En effet, la classe bourgeoise se définit comme regroupant les individus qui possèdent les moyens de productions. Or ces moyens de production lui sont supprimés, la classe bourgeoise disparaît donc, par nature. Les bourgeois deviennent des prolétaires et il en va de même pour les petits bourgeois et les paysans. Quant à la classe moyenne, elle n’est rien d’autre que des prolétaires qui profitaient du système capitaliste. Ils tombent donc aussi dans le prolétariat. Il n’existe donc plus que les prolétaires. Grace à la dictature du prolétariat, les moyens de production sont concentrés entre les mains des prolétaires. Ils deviennent alors des sortes de petits bourgeois car ils possèdent en partie les moyens de production. Cependant ils doivent toujours travailler pour vivre et surtout pour développer leur condition de vie et celle de la société. En réalité, les différences de classes ont alors disparu. L’Etat est remplacé par les individus associés. Ces individus sont alors les hommes qui : « mettent sous leur contrôle toutes leurs propres conditions et celles de tous les membres de la société »1ou les « conditions correspondent au développement simultané des forces productives ». Or les forces productives désignent les hommes qui utilisent leurs forces de travail pour vivre et pour le développement technique de la communauté. Mais dans le communisme, les moyens de production sont détenus par les forces productives, c'est-à-dire que ce sont les travailleurs qui possèdent les entreprises. Ainsi, ces travailleurs peuvent ensemble choisir librement leurs conditions de travail, ainsi que le rendement et la distribution des objets. L’objectif n’est plus le profit d’un individu et la survie des autres mais le développement de tous les travailleurs regroupés autour d’un moyen de production. Ces travailleurs ne sont rien d’autre, dans ces conditions, que des individus associés. Cependant, Marx nous laisse ici un problème fondamental qui est la dimension quantitative de ces associations d’individus. En effet, si nous suivons les propos de Marx, nous devons l’interpréter comme désignant des associations limitées à la grandeur des moyens de production, c'est-à-dire à la grandeur d’une entreprise. Nous pouvons cependant supposer que ces individus se regroupent pour former des communautés autonomes, c'est-à-dire que les individus associés ont la dimension de ville. Effectivement, si l’association des individus correspond aux individus qui choisissent leurs propres conditions de production alors ces derniers sont limités quantitativement à ceux qui utilisent ces moyens de production, ceux qui n’y travaillent pas et qui ne font pas parti des forces productives de l’usine. Cependant, les travailleurs d’une usine ne peuvent pas vivre, d’une façon autonome, que de leur usine, il faut qu’ils aient des rapports avec les autres forces productives. Ils doivent se regrouper autour d’une ville. D’un autre côté, il semble impossible que l’ensemble des individus d’un pays se regroupent en association. Chaque individu ne peut plus avoir le propre contrôle de sa condition sans subir nécessairement celle des autres. En effet, il est impossible d’organiser un vote à dimension nationale pour chaque décision. Il faut alors élire des représentants qui décident de définir les conditions de l’ensemble des moyens de production et dans ce cas, les individus ne sont plus libres du développement de leur propre condition. Plus nous multiplions les instances de représentation et les décisions généralistes et moins le développement des conditions des individus est libre. En effet ce ne sont plus eux qui choisissent pour leur condition particulière mais des représentants qui décident pour des conditions générales. Marx, dans cette première conception de la dictature du prolétariat, n’aborde jamais le développement technique de ces associations d’individus, bien qu’il emploi le terme régulièrement. Cependant, comme nous allons le voir dans la seconde conception de la dictature du prolétariat, Marx envisage les associations d’individus à la dimension communale. Cependant il reste encore une fois le problème de la fédération des diverses associations par un pouvoir publique.

En effet, Marx affirme que les pouvoirs politiques disparaissent. Mais ceci n’est vrai qu’en théorie. Effectivement, la différence des classes a disparu grâce aux mesures prisent précédemment. Ce qui signifie, qu’en théorie, tous les hommes possèdent le même intérêt car ils partagent tous les mêmes conditions de vie. La politique regroupe tout ce qui touche l’ensemble de la communauté. Avant cela, la politique était nécessaire d’une part pour départager les différents intérêts des classes sociales et à savoir quelle classe sociale domine et d’autre part elle était utile pour organiser la domination de cette classe sur les autres. Avec la disparition des classes sociales et de la divergence des intérêts, la politique disparaît car il n’y a plus de nécessité de partager les différents intérêts. Le pouvoir politique disparaît donc naturellement car les différentes classes disparaissent. Inversement, le pouvoir politique est une condition d’existence pour qu’existes différentes classes car il est le lieu public où l’on peut confronter les différents points de vue. Mais ces points de vue sont nécessairement définis par les différences de conditions sociales. Donc le pouvoir politique est le lieu où l’on fait confronter les différentes classes. Sans possibilité de confrontation des différents intérêts de classes sociales, il ne peut exister différentes classes. Ces classes ne sont jamais envisagées par le pouvoir publique et ceci s’assemble à la mise en place de leur disparition physique via la dictature du prolétariat. La politique n’a alors pas et plus lieu d’être.

Ainsi chez Marx, l’Etat est remplacé par le pouvoir publique. Ce pouvoir est débarrassé par du caractère politique. Nous devons aussi remarquer que pour la dictature du prolétariat et aussi pour la société communiste qui suit, Marx ne parle plus de parti communiste mais d’individus associés. Il ne parle plus d’Etat mais de pouvoir public. Cette différence est fondamentale par rapport à tous les exemples historiques qui ont suivi la philosophie de Marx et ceci dés l’expérience de Lénine. Pour Lénine, chaque pouvoir public doit, au contraire, s’appuyer sur un parti politique fort et unique, nous allons voir ce point dans la conclusion. Marx envisage la fin de toute dimension politique dés la fin de la dictature du prolétariat et d’ailleurs, il ne parle jamais du parti communiste dans tout ce qui concerne cette période du communisme. Le pouvoir politique de la dictature du prolétariat abolie dans un premier temps les différentes classes en organisant les différentes mesures que nous avons vues. L’objectif est alors de faire tomber toutes les classes dans le prolétariat. La classe la plus délicate à faire tomber dans le prolétariat semble être la paysannerie car non seulement elle est la classe sociale la plus nombreuse et donc la plus susceptible d’organiser une contre révolution, mais aussi car elle est la classe qui partage les intérêts de la bourgeoisie, c'est-à-dire la possession de propriété privée. Cependant, de la même manière que le prolétariat, elle est plongée dans la misère. En ce sens, elle peut devenir le bras armé de la bourgeoisie car elle est la seule classe qui peut affronter, d’un point de vue quantitatif, le prolétariat. Aussi, bien que la dictature du prolétariat fasse tomber le règne de la bourgeoisie, elle se confronte aussi, et ceci d’une manière encore plus despotique, à la paysannerie. Pendant la dictature du prolétariat, le pouvoir public élimine donc toutes les classes sociales et ensuite il élimine son propre pouvoir politique. C’est lorsqu’il n’y a plus de classe à transformer, qu’il n’y a plus de politique et donc qu’il n’y a plus de dictature du prolétariat.

 

« Dans la société communiste, où chacun, au lieu d'avoir une sphère d'activités exclusive peut se former dans la branche qui lui plaît ; c'est la société qui dirige la production générale qui me permet de faire aujourd'hui ceci, demain cela, de chasser le matin, d'aller à la pêche l'après-midi, de faire l'élevage le soir et de critiquer après le repas, selon mon bon plaisir, sans jamais devenir chasseur, pêcheur ou critique. »

L’Idéologie Allemande, Paris, Gallimard, La Pléiade, 1982


Ainsi la communauté, c'est-à-dire l’ensemble des individus, décide ce qu’il y a comme travail nécessaire pour le bien de la société. Il suffit alors à la communauté de comprendre les manques et de les combler, le reste est alors du travail libre. En effet, à la manière des travaux d’intérêts généraux, certains travaux sont obligatoires car nécessaires pour le bien être de la communauté. Ces travaux sont alors dirigés par la société car ils sont vitaux pour l’ensemble de la communauté. A partir de ceci, les individus choisissent alors dans quel domaine ils veulent évoluer. Dans cette perspective, le travail est alors libre. Chacun n’est plus tenu de faire n’importe quel travail pour survivre, comme dans le capitalisme. Le travail reste cependant tout même obligatoire car il en va de la survie de la communauté mais il n’est plus borné. Ainsi nous pouvons affirmer que, dans le communisme, c’est bien le développement libre des individus qui définit le libre développement de la communauté. Bien entendu le degré de développement d’une spécification dans un domaine ne peut pas être aussi évolué que dans une société capitaliste car il faut parfois nécessairement une longue formation et beaucoup d’heures de travail pour arriver à un certain savoir faire. Ainsi nous comprenons bien comment un boulanger, un boucher ou un ouvrier à l’usine, par exemple, peut se remplacer régulièrement et encore ceci demande nécessairement de la pratique. Mais ceci est encore plus problématique pour un chercheur, un médecin, un ingénieur ou un chimiste. Bien entendu, il ne faut pas oublier que Marx écrit vers les années 1850 et donc le degré de spécification de son époque était beaucoup moindre que celui du notre. La majorité des progrès de notre époque ont pu être acquis grâce à cette spécification. Par exemple, c’est parce que les chercheurs ont abouti dans leur domaine qu’ils ont pu découvrir l’ADN et tout ce qui en découle (entre autre). Ceci est particulièrement vrai pour les domaines scientifiques, mais aussi dans l’aéronautique, mécanique ou encore informatique pour ne citer qu’eux. De nos jours nous ne pouvons plus remplacer un informaticien par un médecin et inversement. Ainsi il semble que nous frôlons alors ici avec l’utopie pour le transposer à notre époque. Quelque chose de nouveau est à inventer ou alors nous devons renoncer aux diverses évolutions scientifiques, mais ceci ne semble pas envisageable. Cependant nous devons noter que le sujet de l’après dictature du prolétariat est de loin le moins envisagé par Marx, surtout d’un point de vue pratique.



1 Idéologie Allemande, Communisme, production d’échanges lui-même, Paris, Gallimard, La Pléiade, 1982