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Titre du blog : La pratique du communisme selon marx
Auteur : lapratiqueducommunisme
Date de création : 17-11-2010
 
posté le 17-11-2010 à 11:49:10

A.2 Le renversement du prolétariat par la bourgeoisie.

« La fraction des républicains bourgeois, qui s’était depuis bien longtemps posée en héritière légitime de la monarchie de juillet, se trouvait ainsi dépassée dans son idéal, mais elle fut portée au pouvoir non pas, comme elle l’avait rêvé sous Louis Philipe, par une révolte libérale de la bourgeoisie contre le trône, mais par une émeute réprimée à coup de mitraille du prolétariat contre le capital. Ce qu’elle s’était imaginé être l’événement le plus révolutionnaire se déroula, en réalité, comme l’événement le plus contre révolutionnaire »

Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte, Paris, Gallimard La Pléiade, 1994, Chap.2, p.449



Le prolétariat tenait donc en main le pouvoir d’une façon faible et donc leurs ennemis directs rentrèrent alors dans une bataille politique qui n’avait pas encore dégénérée en une bataille rangée. A la place du prolétariat s’impose alors les républicains bourgeois. Ces derniers sont partisans d’un Etat à la forme démocratique et constitutionnelle et qui sera consubstantiel de la population de l’Etat, c'est-à-dire inséparable du peuple. Mais ce qui semble ici être une démocratie par et pour le peuple n’est en réalité qu’une autorisation pour que chaque classe sociale organisée puisse défendre ses propres intérêts à travers les élections. Ces républicains bourgeois pensaient être alors les dignes héritiers de la monarchie, mais le pouvoir avait pourtant été confisqué par le prolétariat. Cependant nous ne pouvons pas nier que l’histoire leur donnera raison sur le long terme. En effet, le républicanisme est constitué par une opposition à la monarchie. Le système monarchique est par définition la gestion d’un Etat, de l’administration, du territoire et de la population par un homme qui en fait sa propriété privée et qui distribue les restes à ceux qui ont un droit naturel de fait, c'est-à-dire la noblesse. Tandis que le républicanisme est la gestion d’un Etat par les représentants du peuple et ceci qu’une façon souveraine. Le républicanisme n’abolie pas la propriété privée. Il se veut alors héritier naturel de la monarchie car son système politique est, d’une part, le plus élaboré philosophiquement et politiquement à cette époque (car héritier des philosophes des lumières) et, d’autre part, car il se définit fondamentalement en opposition frontal au système monarchique. Le système communiste est quant à lui en pleine constitution puisque Marx est lui-même contemporain de ces faits. De plus il ne se définit seulement qu’en opposition au système républicain bourgeois. Le républicanisme se développement alors logiquement grâce à une révolution libérale. Il faut ici comprendre « libérale » dans le sens premier du terme, c'est-à-dire le moment où chaque membre de la population détient un morceau du pouvoir et ceci de façon souveraine. Mais il le deviendra aussi dans le sens second du terme où chaque bourgeois pourra acquérir la propriété privée de ses entreprises et s’épanouir pleinement, malgré le fait qu’il n’est pas de droit naturel.

Dans les faits, les républicains bourgeois ont été mis au pouvoir grâce à une réprimande sanglante qui n’avait rien de libératrice pour le prolétariat. En effet, dans le développement logique du prolétariat après la révolution, celui-ci confisque et détruit le capital, c'est-à-dire les diverses entreprises de production privée, dans l’objectif de rendre leur biens publiques. Mais naturellement la bourgeoisie, ainsi que les paysans refusent de céder leur propriété privée. Dans la mesure où le prolétariat ne les avait pas anéantis physiquement et politiquement lorsqu’il en avait le pouvoir, les bourgeois ont alors ripostés férocement. Alors, lors de l’affrontement violent, le prolétariat n’a pas, comme nous l’avons vu, la majorité. Il est donc éliminé du pouvoir politique. Cette action n’est donc pas, comme l’avait espéré les penseurs républicains, révolutionnaire mais elle est au contraire contre révolutionnaire car elle est poussée par le désir de conserver les acquis et les privilèges de l’ancien régime, c'est-à-dire les propriétés privées. Les républicains sont contre révolutionnaires car ils visent à stopper l’évolution politique des descendants directs de la révolution, c'est-à-dire le prolétariat. Ceci au moment où celui-ci supprime les privilèges issus directement de l’ancien système. En effet, le système républicain, bien que largement opposé à la monarchie n’abolie pas entièrement ce régime mais il conserve certains principes qui sont favorables à la bourgeoisie. Le républicanisme est donc révolutionnaire par rapport à la monarchie mais bien moins qu’un système issu du prolétariat. Il est donc contre révolutionnaire vis-à-vis du prolétariat. En matant le prolétariat dans le sang, la bourgeoisie empêche ainsi l’évolution du prolétariat et lui confisque le pouvoir. La bourgeoisie prend alors facilement le pouvoir car le prolétariat est maintenant bien trop faible pour anéantir son ancien allié de révolution. A ce moment précis de l’histoire, c’est donc la bourgeoisie républicaine qui obtient le pouvoir. Nous sommes alors en Juin 1848.


« Autant ils avaient fait preuve de brutalité en abusant de la force physique contre le peuple, autant ces purs républicains furent lâches, ahuris, pusillanimes, mortifiés, inaptes au combat, prompts à reculer, maintenant qu’il s’agissait de défendre leur républicanisme et leur droit à légiférer contre le pouvoir exécutif et royaliste. Je n’ai pas à relater ici la lamentable histoire de leur dissolution ; ce fut non une mort, ce fut une agonie ».

Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte, Paris, Gallimard La Pléiade, 1994, Chap.2, p456


Le républicanisme n’a pas une vocation despotisme, au contraire, et ceci, comme le fait remarquer Marx, bien qu’il ait abusé de la force physique contre une partie du peuple. En effet, le dessein du républicanisme est d’arriver à une démocratie constitutionnelle, c'est-à-dire à un système où chaque individu peut exprimer son avis par le biais de votes organisés : soit en élisant des représentants, soit par référendum. Ainsi chaque homme devient souverain, c'est-à-dire que chacun est détenteur d’un pouvoir politique inaliénable et chaque voix doit être prise en compte. C’est alors selon ces principes qu’il fut « lâche, ahuri, pusillanime, … », lorsqu’il s’agissait de défendre ce républicanisme. Effectivement et paradoxalement, si chaque homme est souverain et si certains hommes sont contre ce républicanisme, ils doivent alors pouvoir le dire et leur avis doivent alors être respecté. Ceci est d’autant plus vrai s’ils sont majoritaires. De plus, comme le laisse entrevoir Marx, dans cette situation historique, le changement de pouvoir n’a jamais était total. Le pouvoir exécutif a toujours été aux mains des royalistes. En effet, le pouvoir exécutif est chargé de la gestion de la politique courante de l’Etat. En d’autres termes, elle est l’organe administratif, ministériel et répressif qui fait respecter la loi et qui organise l’Etat. Pendant la révolution, le pouvoir législatif a pu facilement être remplacé puisque ce pouvoir représente seulement le pouvoir qui édicte la loi. Son organisation est alors beaucoup plus simple. Ainsi le roi étant tombé, il est remplacé par une assemblée d’hommes (de prolétaires puis maintenant de bourgeois républicains). Mais l’institution immense de l’Etat n’est pas aussi facilement remplaçable et beaucoup d’agents de la fonction publique (policiers, armée ou appartenant à l’administration) étaient toujours, dans leur corps et leur esprit, royalistes (c'est-à-dire qu’ils sont habitués à travailler, pour la cause royaliste et bénéficient d’avantages par rapport au peuple). Ils sont alors fidèles à l’organisation qu’ils ont servie depuis toujours. De plus, les fonctionnaires, en général, ne rentrent par dans les catégories sociales de Marx puisque bien qu’étant obligés de travailler pour vivre, ils n’ont pas de difficulté pour vivre et, ils ne sont pas aliéné par leur travail (puisque d’une part ils n’ont pas de patron, et d’autre part n’ont pas d’objet de travail). Ils n’ont alors d’intérêt dans aucune classe sociale si ce n’est celle qui a toujours faits vivre. Le système démocratique pour le républicanisme n’est valable si les républicains sont majoritaires. Sinon, le républicanisme est voué à sa perte.

La révolution a donc, comme nous l’avons vu, était stoppée par le républicanisme bourgeois par le biais de la violence. Ces républicains ont alors pris le pouvoir législatif des mains des prolétaires mais la révolution n’a pas pris le temps, ni même pris des mesures despotiques nécessaires pour purgé le pouvoir exécutif qui est alors toujours aux mains des royalistes et qui l’a toujours été. Cependant, le républicanisme a pour vocation d’accepter les diverses opinons dans son assemblée législative. Nous retrouvons alors dans l’assemblée des bourgeois républicains, quelques représentants du prolétariat et ceux contre qui tous s’étaient battu : des royalistes qui concentrent entre leurs mains bien plus de pouvoir politique, financier et militaire. Alors naturellement le républicanisme perdit le pouvoir au fur et à mesure. Ainsi : « ce fut non une mort, ce fut une agonie ». En effet, dans l’assemblée législative, le parti composé de royalistes, que l’on nommait parti de l’ordre, se dressait en face des républicains. Ce parti était alors composé de monarchistes légitimistes (c'est-à-dire d’hommes qui prônaient un retour du roi selon les règles de successions) et principalement d’Orléanistes (c'est-à-dire d’hommes qui prônaient une monarchie constitutionnelle en faveur du duc d’Orléans). Ce parti devait cependant accepter et respecter le régime républicain. En mai 1849, le parti de l’ordre remporte alors la majorité absolue lors d’élections législatives. Ces derniers soutenaient alors la candidature de Louis Napoléon Bonaparte. Le républicanisme bourgeois fut alors dépossédé de son pouvoir à cause des principes qu’il avait lui-même mise en œuvre et surtout parce qu’il n’a pas été capable d’en terminer, tout comme le prolétariat, avec son vieille ennemi.


« Par conséquent, l’histoire de la constitution ou de la fondation de la république française se divisa en trois périodes : 4 mai au 24 juin 1848, lutte de toutes les classes et de leurs annexes unies en février sous la direction des bourgeois républicains contre le prolétariat, terrible défaite du prolétariat ; 25 juin 1848 au 10 décembre 1848, règne des bourgeois républicains, rédaction de la constitution, état de siège à Paris, dictature de Cavaignac ; 20 décembre 1848 à Fin mai 1849, lutte de Bonaparte et du parti de l’ordre contre la constitution républicaine, défaite de celle-ci, ruine des bourgeois républicains. »

Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte, Paris, Gallimard La Pléiade, 1994Chap.2 p.456


Ainsi l’histoire de la révolution alla de contre révolution en contre révolution, de régression en régression. L’histoire de la république suivit le processus en s’établissant par une contre révolution et en se constituant et en régnant pendant une très courte durée. Elle se fera renverser, par la voix démocratique dans un premier temps, par le parti le plus conservateur et le moins révolutionnaire. Ce que Marx va retenir de ces faits historiques repose dans le fait que toute révolution est suivie nécessairement d’une crise de la révolution où les anciens alliés et vieux ennemis profitent de la faiblesse de la situation pour reprendre le pouvoir. En effet, lors d’une révolution, l’ancien système, qui assurait une certaine stabilité et sécurité, est remis totalement à plat. Quelque chose de nouveau est alors à construire. Mais chaque parti qui a œuvré à la révolution veut naturellement construire son propre système qui lui est favorable. Ceci sans prendre en compte que l’ancien système cherche à revenir au pouvoir. Les prolétaires désirent ainsi une sorte de communisme, d’autres du nationalisme, les bourgeois désirent quant à eux le républicanisme ou une monarchie constitutionnelle, les paysans veulent leurs propriétés privées. Celui qui obtient finalement le pouvoir a alors nécessairement plus d’ennemis que d’alliés car ses anciennes alliances ne tiennent plus. Ceux qui n’ont pas le pouvoir s’allient alors à leur tour pour combattre celui qui l’a obtenu. Ainsi cela s’est produit entre la classe du prolétariat et celle de la bourgeoisie républicaine. Ce processus est alors appelé crise de la révolution. Le phénomène est d’autant plus étendu que pendant une période d’instabilité politique le nombre, les partisans de l’ancien régime ne cesse de s’accroître. La sécurité et la stabilité de l’ancien régime semble préférable à ce chaos politique. C’est de cette manière que le républicanisme se fit renverser par la voix démocratique. La crise de la révolution est alors définie par le risque constant d’une contre révolution. La principale erreur des deux classes sociales qui ont eu le pouvoir entre leurs mains est de n’avoir jamais agit pour lutter contre leurs anciens alliés, autrement dit de n’avoir jamais prit en compte la crise de la révolution. Leur erreur est de n’avoir jamais été despotique, mais d’autres ont su à leur place